Covoiturage et traitement fiscal : une clarification heureuse et positive
La différence fiscale entre le covoiturage et les VTC
Et l’administration de préciser :
« Cette condition relative au montant perçu doit être appréciée strictement : le montant perçu ne doit couvrir que les frais supportés à l’occasion du service rendu, à l’exclusion de tous les frais non directement imputables à la prestation en question, notamment les frais liés à l’acquisition, l’entretien ou l’utilisation personnelle du ou des bien(s), support(s) de la prestation de service partagée. »
Cela permet de distinguer clairement ce qui relève du covoiturage, de ce qui relève d’une pratique de dumping social du métier de taxi/VTC. Comme nous l’expliquions ici, certains acteurs jouaient sur l’ambiguïté de la notion de partage de frais, pour affirmer qu’il doit se calculer à l’année et donc permettre une indemnisation à l’acte du covoiturage à des niveaux qui s’apparentent à un travail (non taxé…). En substance, ils disent : ‘‘vous pouvez tarifer chaque trajet au niveau que vous voulez, à condition de ne pas dépasser, 5000€/an correspondant à l’estimation du coût global de la possession d’une voiture’’. Autrement dit, on peut faire payer un trajet 60ct€/km/passager par exemple (soit 2 fois moins qu’un taxi/VTC, mais dix fois plus que du covoiturage), et on s’inscrit toujours dans la catégorie covoiturage. L’administration précise, et c’est du bon sens, que non : le partage s’effectue à l’acte précis de co-consommation (pas sur une moyenne pondérée).
L’exonération du partage de frais pour un déplacement en voiture
Elle précise également qu’il faut que le calcul du coût considère également le bénéfice de l’acte de co-consommation pour « l’offreur » (le conducteur dans le cas du covoiturage) : «Les revenus réalisés par un particulier au titre du partage de frais qui peuvent bénéficier de l’exonération sont ceux perçus dans le cadre d’une « co-consommation », c’est-à-dire d’une prestation de service dont bénéficie également le particulier qui la propose, et non pas seulement les personnes avec lesquelles les frais sont répartis.»
Tout cela est, encore une fois très logique : si le conducteur d’un trajet ne bénéficie pas du déplacement (c’est-à-dire qu’à la fin du trajet, il ne descend pas du véhicule pour vivre sa vie dans ce nouveau lieu), alors ce n’est plus de la co-consommation, mais simplement de la consommation d’un service rendu par un conducteur (bref, une prestation classique).
Tout ceci correspond d’ailleurs à la réglementation sur les transports (article L. 3132-1 du code des transports).
Comment calculer le prix d’un covoiturage ?
L’administration fiscale indique qu’il est possible d’utiliser le barème kilométrique pour calculer le coût de l’activité. Et de donner un exemple précis, sur un trajet Paris-Rennes.
« Exemple : Un particulier habitant en région parisienne se rend tous les week-ends dans sa résidence secondaire située à Rennes. Sur une plate-forme spécialisée dans le covoiturage entre particuliers, il propose ce trajet dans la limite de 2 places disponibles. La puissance fiscale du véhicule de tourisme est de 6 CV. Le carburant utilisé est du super sans plomb :
– nombre de kilomètres parcourus par trajet : 360 km ;
– frais de péage inhérents au trajet : 29 € ;
– barème forfaitaire pour un véhicule de 6 CV: 0,568 € / km ;
– évaluation forfaitaire du trajet : 360 x 0,568 = 204,48 € ;
– nombre de places disponibles : 2.
Si le contribuable souhaite recourir au barème kilométrique, le coût du trajet par personne s’élève à 204,48 / 3 = 68 € .
Si le prix proposé sur la plate-forme n’excède pas 68 € par personne, le revenu ainsi réalisé est exonéré. »
On remarque que :
- l’administration considère les personnes qui occupent le véhicule réellement. On aurait pu imaginer d’autres modes de répartition (par exemple, un coût « à la place » : 204,48/5=40,9€ pour un véhicule de 5 places) ;
- l’administration mentionne les frais de péage mais ne semble pas l’intégrer dans le coût global… mystère.
Les limites de tarifs pour les acteurs du covoiturage
Au final, l’administration considère qu’il est légitime de faire payer jusqu’à 19 ct€/km pour un passager pour ce trajet avec trois personnes. Soit trois fois plus que la pratique constatée par l’ADEME sur la plateforme principale, Blablacar (6ct€/km).
Ainsi, il existe une vraie marge de manœuvre pour les acteurs du covoiturage sur la tarification… pourvu qu’ils n’organisent pas des pratiques professionnelles qui, dans ce cas, doit entrer dans un régime conventionnel de revenus imposés.
Nous soulignons que nous estimons que cette clarification est très positive : seule une vraie mutualisation des trajets existants garantira que le covoiturage apporte des bénéfices sociaux, économiques et environnementaux. Et que l’économie du partage restera positive pour la société.
PS : nous attendons avec impatience les commentaires, apparemment plus réservés, des auteurs du blog droit du partage !