Mobilité durable et décarbonation en zones rurales et périurbaines : quelles solutions concrètes ?

Comment libérer la France de l’assignation au volant ? À l’occasion du salon European Mobility Expo 2024, Sylvain Laval (SMMAG), Anne-Céline Imbaud-de Trogoff (SGP), Edouard Henaut (Transdev), Jean-Christophe Combe (Keolis) et Thomas Matagne (Ecov) se sont réunis autour d’une table ronde pour répondre aux défis de l’extension de l’offre de transports express aux territoires ruraux et périurbains.

Cet échange intervenait quelques jours après le discours du nouveau Premier Ministre Michel Barnier qui faisait part le 1er octobre 2024 de son intention d’ “investir en priorité dans les transports du quotidien« , notamment dans les zones périurbaines et rurales.

Ces zones sont celles que nous appelons, chez Ecov, la “France qui conduit”. France qui, par manque d’offre de transports qualitative, est assignée soit au volant soit à résidence. Cette dépendance structurelle à la voiture entrave la mobilité quotidienne de millions de Français. Son impact environnemental est significatif : 53% des émissions de gaz à effet de serre des transports sont liées à l’utilisation de la voiture (developpement-durable.gouv.fr, 2023). Avec seulement 1,6 passagers transportés par une voiture sur toute sa durée de vie, tous déplacements confondus (IDRRI, 2019), l’hypermobilité se traduit par une extraordinaire inefficacité…

Les S.E.R, solutions émergentes pour en finir avec l’assignation au volant

Lors du salon EUMO, les intervenants ont partagé leur vision des Services Express Routiers (S.E.R). Alliance des lignes de car express et des lignes de covoiturage express, ils constituent la composante routière des SERM (Services Express Régionaux Métropolitains)

Les lignes de car express (Édouard Henaut)

Pour Edouard Henaut, le car express présente de nombreux atouts : flexibilité, rapidité de déploiement, coût peu élevé et fréquence rapide.

Pour 1 train par heure, le car express permet 4 fois plus de fréquence et un coût 2 fois moins élevé. Il présente ainsi un potentiel significatif de résolution des problèmes de liaisons entre les villes moyennes.

Edouard Henaut est par ailleurs revenu sur l’intégration du car express dans les SER/SERM – dont la première ligne a été ouverte par Transdev entre Bordeaux et Créon en 2019. Pour lui, « la création d’une ligne de car express devient nécessaire pour un trajet emprunté par 2000 à 3 000 personnes, seuil en deçà duquel le covoiturage peut prendre le relais, tandis qu’au-delà, le RER est le moyen de transport le plus pertinent« .

Les lignes de covoiturage express (Thomas Matagne)

Thomas Matagne a présenté la manière dont les lignes de covoiturage express s’attaquent à l’inefficacité du système voiture solo. Notamment en permettant de proposer une offre flexible pour les usagers, indispensable pour massifier le report modal des automobilistes.

Autre composante des S.E.R, elles constituent un système de transport fréquent, avec un temps d’attente moyen de moins de 4 minutes sur les lignes. Soit une fréquence équivalente à celle d’un métro – en zone peu dense. Et une démotorisation à hauteur de 20% sur les réseaux les plus matures, comme Lane, tout en garantissant la liberté et l’indépendance offertes par la voiture.

Synthèse

Là où il n’est pas possible de remplir des trains ou des cars toutes les 5 minutes, la voiture peut être intégrée au système de transports collectifs pour étendre l’offre express à la France qui conduit.

« Intégrer la voiture dans sa dimension partagée au système multimodal permet d’étendre le domaine des transports collectifs » a précisé Thomas Matagne.

Complémentarité et multimodalité : pour une mobilité plus juste en zone rurale et périurbaine

Pour l’ensemble des intervenants, la multimodalité est envisagée comme réponse aux problématiques de mobilité en zones peu dense, périurbaines et rurales.

Jean-Christophe Combe – Directeur Marketing, Innovation, RSE du groupe Keolis -, Sylvain Laval – Président du SMMAG et Vice-Président de Grenoble Alpes Métropole – et Anne-Céline Imbaud-de Trogoff – Directrice exécutive du développement des transports territoriaux à la Société des Grands Projets (SGP) ont chacun partagé leur vision.

Coordonner les services pour une offre attractive et résiliente (Jean-Christophe Combe)

Le Groupe Keolis exploite des lignes de car express sur toute l’Europe et promeut depuis de nombreuses années le déploiement d’offres multimodales. Jean-Christophe Combe a ainsi cité l’étude récemment menée sur la région grenobloise avec Ecov afin de travailler au rapprochement entre les lignes de covoiturage et les lignes de car express.

Pour lui, “l’alliance d’une ligne de car express et d’une ligne de covoiturage express sur un même axe permet de produire une offre de mobilité attractive, cadencée, fiable et résiliente”. Ces services sont complémentaires dans l’espace et dans le temps, puisqu’ils permettent notamment l’extension du maillage territorial, le renfort de fréquence et l’absorption des heures d’hyper pointe.

Comment désencombrer les centres-villes ? Le rôle central des collectivités dans l’optimisation de la mobilité périphérique (Sylvain Laval)

Sylvain Laval a dressé un constat partagé par de nombreuses collectivités : il est impératif de répondre aux besoins des habitants de la grande périphérie et des zones peu denses et rurales en matière de connexion aux zones denses.

Selon lui, c’est notamment la priorité pour décongestionner les centres-villes, alors que la plupart des grandes villes sont déjà très bien dotées en transports urbains. “La logique de complémentarité entre les modes de transport est la solution la plus efficace, peu coûteuse, avec des réponses immédiates”, affirme-t-il.

Sylvain Laval a également rappelé la nécessité, pour les opérateurs, de garantir l’attractivité et la simplicité des services. Les AOM (Autorités Organisatrices de Mobilités) jouent pour cela un rôle de coordination essentiel pour rendre la solution finale utilisée par les citoyens cohérente, facile et attractive. Avec un cadre réglementaire simplifié, l’engagement des opérateurs et une volonté collective – cette multimodalité représente la solution aux problématiques de mobilité en zones peu denses.

Construire des offres stables et abordables à travers la complémentarité entre S.E.R et S.E.R.M (Anne Céline Imbaud-de Trogoff)

Anne-Céline Imbaud-de Trogoff a rappelé l’orientation multimodale, ferrée,routière et active, et l’approche servicielle de la SGP dans l’application des SERM : “les Services Express Routiers (S.E.R), doivent être complémentaires du train et non pensés comme transitoires”.

Afin de rendre les offres de mobilité plus accessibles et stables, la SGP apporte une vision multimodale à tous les acteurs des SERM. Cette vision est notamment motivée par l’impératif d’améliorer la mobilité du quotidien des personnes vivant autour des métropoles en leur permettant de se déplacer moins cher et plus vert.

Ces échanges ont encore une fois montré que, grâce à des initiatives comme les S.E.R, nous avons les outils en main pour offrir une mobilité durable et accessible à tous, désenclavant des millions de citoyens des zones rurales et périurbaines. Il est temps pour les collectivités et les opérateurs de saisir cette opportunité pour coordonner leurs efforts. Et de garantir un avenir où la mobilité est à la fois durable et accessible pour tous. Pour aller plus loin, téléchargez notre livre blanc dédié à la vision transport express pour tous.

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